La Sirena, Corcovado : 2 jours au cœur de la jungle la plus sauvage du Costa Rica


Auteur : Pauline & Hubert

Publié le : 16/04/2025


On quitte Drake pour plongez deux jours au cœur de la station La Sirena, dans le parc national Corcovado : singes hurleurs, tamanduas, tapirs, trogons et bien d’autres surprises au rendez-vous. Un séjour sauvage et inoubliable à découvrir !

Débarquement express à Sirena

La jungle fume encore sous l’orage de la veille, exhalant un parfum épais et animal. Les capucins ont dû passer une sale nuit sous la pluie, ils traînent la patte ce matin.

6h30, embarquement immédiat pour le Corcovado. La lancha, bringuebalée par la houle, nous cueille sans ménagement. Le capitaine, tendu, lutte contre les éléments le long de la côte déchiquetée. Une bonne vague me trempe d’entrée de jeu. Une heure plus tard, une dizaine de lanchas, dont la nôtre, déverse une centaine de touristes explorateurs à La Sirena. Certains ont opté pour le look Indiana Jones. Nous, on fait soft : pantalon convertible, veste légère et bien sûr, téléobjectif en bandoulière.

Première épreuve : le contrôle des rangers. Exit les bouteilles plastiques et snacks en tout genre. Ma gourde a un bouchon capricieux, je risque la noyade de mon sac au premier faux mouvement. Après un remplissage stratégique, nous suivons Tony, notre guide, avec un autre couple. Moins on est nombreux, plus on a de chances d’apercevoir la faune.

Après 20 minutes de marche, premier spectacle : un Tamandua mexicana, appartenant à la famille des Fourmiliers, roupille dans un arbre. Réveillé par notre présence, il se faufile de branche en branche, son flair en guise de GPS.

Un Troglodyte des ruisseaux nous gratifie d’un passage furtif, ventre rayé trahissant sa présence. Plus loin, Tony repère un Alapi à dos roux et dégaine sa longue-vue. Son œil bleu ciel nous transperce.

La station La Sirena se dresse dans une clairière. Une fois nos affaires casées, un café avalé, nous attaquons le sentier vers le Rio La Sirena. A marée haute, gare aux requins bouledogues qui adorent s’aventurer dans l’estuaire.

Le Corcovado abrite huit écosystèmes. En une matinée, nous traversons forêts de chênes, palmeraies, mangroves. Cet éden tropical a bien failli disparaître sous l’avidité humaine : agriculture intensive, exploitation forestière, ruée vers l’or… Les vestiges du passé ? Des Palmiers pêche, jadis cultivés pour leurs cœurs tendres et qui, ironie du sort, ont permis à des tribus en fuite de survivre dans la forêt. SI vous voulez en savoir plus, ça se passe dans l’article Histoire du Corcovado.

Tony installe sa longue-vue en direction d’une branche anodine pour nos yeux novices. Un œil jaune s’ouvre : un couple de Ducs à aigrette nous toise, impassible. Plus loin, un Grisin sombre disparait à notre approche, tandis qu’un Trogon de Baird nous éblouit de son ventre rouge vif. Les six strophes « aow-aow-aow » du Trogon aurore résonnent dans la canopée.

Soudain, la cime des arbres s’agite. Les atèles bondissent de liane en liane, hyperactifs. Ici, leur densité atteint des records grâce à la protection de la forêt et à l’abondance de figuiers. L’un d’eux nous observe, méfiant, avant de disparaître.

Sortie de forêt : une Buse noire trône au sommet d’un palmier, scrutant l’estuaire. Plus bas, une surprise nous attend : une femelle tapir, endormie sous les feuillages. Immobile, serein, il ne nous entend pas nous approcher pour l’observer.

Entre oiseaux flamboyants et sieste réglementaire

Sur la plage, un Manakin à cuisse jaune improvise un moonwalk à la Mickaël Jackson. Il claque des ailes, imitant une branche qui casse. Plus haut, des Toucans tocards nous balancent des graines sur la tête, comme s’ils se payaient notre tête. Un peu plus loin, un Pic ouentou fait résonner la forêt, tandis qu’une Buse à gros bec nous observe en juge silencieux.

Pause déjeuner à la station : riz, haricots rouges, gratin de courgettes et jus de tamarin. Puis sieste forcée. Pas par choix, mais par règlement : interdiction de s’éloigner sans guide. Frustrant quand on entend les singes araignées s’exciter au loin ! On patiente en observant les juvéniles d’Aigrettes bleues patauger dans la vase.

Fourmis, tapirs et moonwalk sauvage

Reprise de la balade à 15h. Une colonne de fourmis coupe notre chemin, transportant des morceaux de feuilles plus grands qu’elles. Véritables agricultrices, elles cultivent un champignon nourricier sous terre. Plus loin, un monticule intrigant : la « poubelle » de la colonie, où s’entassent cadavres et déchets.

Sur le sentier, une famille de Pécaris à collier fouille le sol. Un mâle tente une approche séductrice sous notre regard amusé. Plus loin, un agouti traverse en trombe, nous laissant à peine le temps de l’admirer.

Sur la plage, Tony nous crie de courir. Un saïmiri bodybuildé (effet saison des amours) se gave de fruits dans un buisson. Petite bombe de vitalité, il nous gratifie de ses plus belles mimiques. Je mitraille de photos. Je rêvais de croiser de petits singes écureuils sauvages. Le Corcovado me l’a offert !

La jungle a encore bien des surprises à offrir, mais la nuit approche.

Demain, le Corcovado nous réserve encore son lot d’émerveillements. Pour l’heure, place au repos, bercés par le chant des grenouilles et le souffle de la forêt tropicale.

Corcovado, acte 2

5h du matin, la jungle s’éveille et nous aussi. Les guides répartissent leurs groupes sur les sentiers alors que les singes hurleurs lancent leur premier concert du jour, un mélange de cris gutturaux dignes d’un Jurassic Park matinal. Nous empruntons le Pavo Trail, inexploré la veille. Deux aras rouges nous survolent, striant le ciel de leur éclat coloré. Tony, notre guide, nous dévoile une ruche discrète, identifiable seulement par le tube de 20 cm construit par ses occupantes. Puis, il digresse sur les pesticides, l’immigration nicaraguayenne et les compagnies américaines exploitant les cultures de bananes et d’ananas. Mais des traces fraîches de puma ramènent l’attention sur l’essentiel : la jungle.

Un peu plus loin, un tapir fouille la végétation de son nez mobile. Son appétit insatiable nous fascine, mais le nôtre nous ramène à la station pour un petit-déjeuner costaricien : riz, haricots rouges, œuf et papaye.

Nous plongeons ensuite dans la forêt primaire, où les chants d’oiseaux remplacent les observations directes, tant la végétation est dense. Les arbres, organisés en trois strates, montent jusqu’à 60 mètres. Parmi eux, l’arbre à caoutchouc, utilisé depuis les Aztèques pour fabriquer chaussures et balles, et le palmier marcheur, qui aurait la capacité de « se déplacer » en développant de nouvelles racines.

Dans cette cathédrale verte, un Fourmilier à dos brun saute furtivement dans l’ombre, tandis qu’un Cacique à dos rouge suspend son nid au-dessus de nos têtes. Tony nous présente un Espavel, arbre colossal dont le bois servait autrefois à la construction de voiliers. Son nom vient de l’expression « es para ver » : grimper en haut de ses cimes offrait un panorama sur la jungle.

Sur le sol, un Grand Tinamou tente de se fondre dans le décor en s’éloignant sur la pointe des pattes. Plus haut, une Organiste mouchetée s’échappe furtivement. Nous faisons une halte devant un « Crocodile Tree », un arbre hérissé d’épines. Sa défense impressionnante vise un prédateur inattendu : le paresseux, visiblement prêt à risquer quelques écorchures pour ces feuilles appétissantes.

Un Tamatia de Lafresnaye nous observe immobile, ses yeux rouges braqués sur sa prochaine proie. Un Ermite à longue queue, colibri aux allures de cambrioleur avec son masque noir, daigne faire une pause, nous offrant une opportunité rare de le photographier. Sur un tronc, un Grimpar maillé escalade avec une agilité déconcertante, tandis que trois Pics à bec clair jouent à cache-cache dans un tourbillon rouge et noir.

Derniers pas dans le Corcovado

Le sentier du retour est un champ de boue : glissades garanties. De retour à la station, nous savourons ces derniers instants en pleine nature. Puis vient le moment du départ. L’accostage du bateau est sportif, entre les vagues de l’océan Pacifique et la jungle qui semble vouloir nous retenir. Je me prends à rêver d’y rester, de disparaître dans cette nature foisonnante. Alors que nous approchons de Playa Rincón, les frégates superbes planent au-dessus de nous, silhouettes préhistoriques découpées sur le ciel. Jurassic Park n’a qu’à bien se tenir !

Nous retrouvons notre 4×4 garé au Kinkajoungalow, prêts à reprendre la route, mais avec une certitude : une partie de nous est restée dans la jungle du Corcovado.

Nous traversons maintenant la Péninsule d’Osa, pour explorer la côte est, le Golfo dulce, depuis Puerto Jimenez. Et bien sûr qu’on refera un saut dans le Corcovado depuis l’entrée La Leona !

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